Le couple.

Publié le par Gaetanne42

 

  oiseaux3  Romain Rolland, dans son beau livre, fait entendre qu’un bon ménage est rare, et par des causes naturelles. En suivant les mêmes chemins, en considérant les personnages vivants qui se sont trouvés dans mon chemin, j’aperçois des traits distinctifs qui rendent souvent les 2 sexes ennemis l’un de l’autre, sans qu’ils sachent toujours bien pourquoi. L’un est affectif, l’autre actif ; cela a été dit souvent et rarement expliqué.

 

Affectif n’est pas la même chose qu’affectueux. Ce qu’il faut entendre sous le mot, c’est une liaison plus étroite des pensées avec les sources de la vie ; cette liaison s’observe chez tous les malades, quel que soit le sexe ; mais elle est normalement plus étroite chez la femme, par la prédominance naturelle des fonctions de grossesse et d’allaitement, et de tout ce qui s’y rattache. D’où des changements d’humeur dont les causes sont naturelles, mais dont les effets donnent souvent l’apparence de la fantaisie, de l’incohérence, de l’obstination. Sans aucune hypocrisie ; car il faut une profonde sagesse, et fort rare dans le fait, pour expliquer un mouvement d’humeur par ses véritables causes, attendu que la vraie cause change aussi nos motifs. Si une fatigue à peine sentie m’enlève le goût de la promenade, elle me fait trouver aussi des raisons de rester chez moi.

 

On entend souvent sous le nom de pudeur une dissimulation des vraies causes ; je crois que c’est plutôt une ignorance des vraies causes et comme une transposition naturelle et presque inévitable des choses du corps en langage d’âme.

L’homme amoureux est comme stupide devant ces textes.

 

L’autre sexe est incompréhensible dans l’inaction. Sa fonction propre c’est de chasser, de construire, d’inventer, d’essayer. Hors de ces chemins il s’ennuie, mais toujours sans s’en apercevoir. De là un mouvement perpétuel pour de petites occasions ; sa bonne volonté, en le dissimulant, l’aggrave. Il lui faut un aliment politique ou industriel.

Et il est commun que les femmes prennent aussi pour hypocrisie ce qui est un effet de nature. On peut voir les crises de ce genre analysées avec profondeur dans les Mémoires de deux jeunes mariées, de Balzac, et surtout dans Anna Karénine, de Tolstoï.

 

Le remède à ces maux me paraît être dans la vie publique, qui agit de 2 manières.

 

D’abord par les relations de famille et d’amis, qui établissent dans le ménage des relations de politesse, absolument nécessaires pour dissimuler tous ces caprices du sentiment, qui n’ont toujours que trop d’occasions de s’exprimer. Dissimuler, entendez bien ; ce qui n’est que mouvement d’humeur n’est même pas senti, dès qu’on ne peut le montrer ; c’est pourquoi, autant que l’on aime, par politesse est plus vraie que l’humeur.

 

Et puis la vie publique occupe l’homme et le détourne de cette oisiveté de complaisance, dans laquelle il n’est jamais naturel, quelque bon vouloir qu’il y mette.

 

C’est pourquoi il y a toujours à craindre pour un ménage trop isolé et qui se nourrit d’amour seulement. Ce sont des barques trop légères, trop mobiles au flot, sans lest. Et la sagesse par réflexion n’y peut pas grand-chose. C’est l’institution qui sauve le sentiment.

 

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